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L’illusion de la vitesse
Entre la réduction récente à 90 km/h sur la rocade et celle à venir à 110 km/h des autoroutes sur l’aire urbaine de Toulouse (projet PDU), le tout surveillé par des radars, la vitesse est un bon sujet de discussion entre automobilistes. La Lorraine expérimente même le 110 km/h sur ses autoroutes non concédées. Le sens de l’histoire est donc de réduire les vitesses des véhicules motorisés.
On notera toutefois que quelques portions ont été relevées sur l’agglomération toulousaine : chemin de la Loge de 30 à 50 km/h à l’occasion de son changement de sens, une partie du chemin des Etroits de 50 à 70 km/h
En ville, beaucoup utilisent le vélo car c’est un moyen de transport rapide. Le vélo c’est entre 15 et 20 km/h, presque partout, tout le temps, à 8h, à 10h, à 18h. La voiture c’est entre 0 et 250 km/h théoriques (oui, oui, c’est interdit mais c’est possible) mais environ 13km/h en pratique en moyenne au compteur en ville.
Le vélo en ville est une évidence et pourtant beaucoup préfèrent encore l’illusion de la vitesse.
Passons à la proche banlieue. Régulièrement, je parcours à vélo un trajet de très exactement 10,7 km et je mets en moyenne 35 minutes soit un peu plus de 19 km/h. En voiture, pour cette même destination, il faut parcourir 11,7 km car la magie du pétrole pas cher, c’est de faire moins long en temps pour plus long en distance. Le temps passé est d’environ 18 minutes (hors bouchons) soit 40 km/h (car aux heures de pointe cela peut facilement durer 45 minutes).
Donc, deux fois plus de temps à vélo... quel intérêt de pédaler ?
Heureusement Ivan Illich est venu à mon secours. Dans son ouvrage « Energie et équité », il évoque le concept de vitesse généralisée. Le temps mis pour faire un parcours doit prendre en compte le temps du chronomètre du point A au point B mais aussi le temps de travail qu’il a fallu pour réunir l’argent nécessaire à l’achat et à l’utilisation du moyen de locomotion.
Voyons cela de plus près pour mon parcours.
Le vélo revient à environ 0,02€/km tandis que la voiture environ 0,35€/km. Ce sont des prix de revient moyens compte tenu de l’amortissement de l’achat, l’entretien, l’assurance, l’essence (et cela ne changera guère avec la taxe carbone telle que prévue)...
Le salaire moyen d’un Français est de près de 12€ nets /heure.
Vélo, 10,7 km à 0,02€/km = 0,21€
Heures de travail nécessaires = 0,21€/ 12€ = 61 secondes. Le temps total de mon parcours est donc de 35 + 1 = 36 minutes.
Voiture, 11,7 km à 0,35€/km = 4,1€
Heures de travail nécessaires = 4,1€/ 14€ = 20,5 minutes. Le temps total de mon parcours sera de 18 minutes + 20,5 minutes = 38,5 minutes.
Conclusion, la voiture est moins rapide que le vélo, et pourtant elle a utilisé une rocade 2X3 voies, interdite aux vélos, dont le coût n’a pas été pris en compte dans le calcul, ce qui ralentirait encore notre « char ». Idem pour les coûts de santé dûs à la pollution et aux accidents, dits coûts externalisés (et payés par les impôts et la sécu en grande partie).
D’une manière générale, utiliser sa voiture 14000 km/an à 60 km/h en moyenne, ce qui concerne pas mal de monde motorisé, revient à rouler à une vitesse généralisée de 22 km/h soit presque aussi vite qu’à vélo.
Ah oui, au fait, la taxe carbone est-elle vraiment dissuasive ? En 2010, il faudra travailler 3h sur l’année avec les hypothèses automobilistiques précédentes pour la payer, ce qui réduira la vitesse de seulement 0,1 km/h...
Finalement il faut certainement plaindre ceux qui sont dépendants d’une tonne de ferraille propulsée avec une énergie en voie de disparition et mettant la planète en péril, pour se déplacer à seulement 22 km/h...
Mis à jour le lundi 5 octobre 2009, par